La traduction de la musique

On a dit que la musique a « le pouvoir d’affecter nos émotions, notre sagesse et notre psychologie; elle est capable de soulager notre solitude ou de susciter nos  passions » (Yang 2014). Puisqu’on habite dans une société de plus en plus mondialisée, on se demande si le pouvoir de la musique peut transcender les barrières linguistiques. Il y a certaines personnes qui croient qu’on ne peut jamais traduire la musique fidèlement; plus précisément qu’il y aura toujours un écart entre le texte du départ et le texte d’arrivée. D’autres soutiennent que, en dépit des difficultés inhérentes à la traduction de la musique, il faut faire un effort quand même. Car en fin de compte, c’est à travers cet effort que « la traduction élargit notre capacité à explorer… les pensées et les sentiments des gens venant d’une autre société ou d’une autre époque » (Schulte 2015).

Selon l’écrivain allemand, Berthold Auerbach, « La musique seule est un langage universel et n’a  point besoin d’être traduite, c’est que par elle l’âme parle à l’âme ». Bien qu’un tel point de vue puisse paraître trop romantique, il y en a certaines qui proposent que l’idée d’une traduction littérale n’est ni possible ni souhaitable. Lorsqu’on tente de traduire mot pour mot, on peut modifier ou masquer le vrai sens d’un texte. La traduction des chansons est encore compliquée par le fait qu’il est impossible d’imiter toutes les sonorités des langues étrangères. Par conséquent, le fossé entre la chanson de départ et la chanson traduite reste infranchissable, malgré les grands efforts du traducteur (Spaeth 1915).

Peut-être faut-il accepter l’idée que la traduction des chansons n`est pas une science exacte, mais plutôt « un métier pratique qu’on exerce dans un domaine imparfait des mots et leur signification, où on doit faire face aux particularités de la langue cible avec ses lacunes lexicales, son rythme particulier, son manque de rime appropriée » (Low 2005).

Compte tenu des imperfections de la traduction des chansons, il convient de se demander pourquoi nous devrions traduire les chansons? Selon Spaeth, l’objectif principal est la valeur éducative. On devrait traduire la musique à condition de pouvoir enseigner au public quelque chose d’important. Si grâce à sa traduction, « […] une chanson ou un opéra peut élargir sa sphère d’influence … Il est préférable d’avoir une connaissance approximative qui vient d’une imitation faible que d’une ignorance totale>> (Spaeth 1915).

Néanmoins, le processus de la traduction des chansons n’est pas un exercice facile. Il faut donner l’impression au public que la musique a été adaptée pour le texte d’arrivée, même si en réalité, elle a été adaptée pour le texte du départ. Comme Low (2003) nous explique, « […] le texte cible doit correspondre à la musique préexistante avec ses rythmes, ses valeurs de notes, ses  phrasés et ses accents- tout en gardant l’essence du texte source ».

En outre,  il y a certaines contraintes spécifiques dont il faut tenir compte. Comme: (1) la  chantabilité  (singability) (2) le sens (3) la naturalité (4) le rythme (5) la rime (Low 2003). Pour commencer, il faut accorder la priorité à la musicalité de la chanson traduite. Afin de conserver la chantabilité, il faut avoir une manipulation de la mélodie ainsi que de la longueur des syllabes (Jessica Holtby 2015).

Ensuite, lorsqu’on traduit un texte de nature informative, on accorde beaucoup d’importance à la précision sémantique. En ce qui concerne les chansons par contre, l’importance qu’on accorde à la musicalité signifie qu’il faut un niveau de flexibilité qui permet au traducteur de manipuler le sens du texte.

En troisième lieu, il faut qu’on prenne en compte le registre et l’ordre des mots, ce qui contribue à l’élément de la naturalité  de la langue cible. Low (2003) nous explique qu`un langage faux et peu naturel exige un plus grand effort de traitement de la part du public. Dans le cas des textes rédigés, il y a toujours l’opportunité de les relire lentement. En revanche, dans la traduction des chansons, il n’est pas possible d’allonger le temps de traitement.

Au niveau du rythme, le traducteur doit veiller à respecter celui qui préexistait dans le texte source. Enfin,  il est souhaitable de trouver la rime dans la traduction des chansons. Étant donné que la rime se trouve souvent dans le texte source, le traducteur doit également respecter cet élément.

Pour conclure, Spaeth (1915) croyait que « le traducteur idéal n’est pas seulement un linguiste, mais également un poète et musicien en même temps ». Ces sentiments se reflètent dans l’idée de Yang (2014) qui exprime qu’une traduction réussie des chansons vient d’un traducteur qui est qualifié dans les domaines de la littérature et de la musique. La capacité d’apprécier la beauté esthétique de la musique est essentielle.

En dépit des contraintes  inhérentes à la traduction des chansons, il ne faut pas oublier l’importance de la traduction de la musique. Au fur et à mesure que notre société devient plus internationale, la traduction des chansons approfondira et élargira notre conscience du monde puisque « L’art de la traduction continuera d’être une force destinée à promouvoir la communication  interculturelle dans une société mondialisée » (Schulte 2015).

Annie Dam (FREN 454)

Bibliographie

Holtby, Jessica. Class Presentation. (2015).

Low, Peter. “Translating Poetic Songs: An Attempt at a Functional Account of Strategies.“ Target 15.1 (2003):91-110. Web.

Low, Peter. “The Pentathlon Approach to Translating Songs.“ Song and Significance: Virtues and Vices of Vocal translation. (2005).

Schulte, Rainer. “What is Translation?“ http://translation.utdallas.edu/essays/what-is-translation.html. Consulté le 11avril

Spaeth, Sigmund, “Translating to Music.“ The Musical Quarterly, Vol. 1, No. 2 (April 1915), pp 291-298.

Yang, Jian-Sheng. “Aesthetic Object and Subject in Song Translation.“ English Language and Literature Studies; Vol. 4, No. 4; (2014).

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